LE PLAN DE LAURENT CHARDARD
Médaillé de bronze en natation aux Jeux Paralympiques de Paris 2024, Laurent Chardard, installé à Pessac et licencié aux Girondins de Bordeaux Natation, vise encore mieux pour 2028. Et pour cela, rien n’est laissé au hasard.
Une reconnaissance. Le 28 août dernier, Laurent Chardard a plongé seul dans les eaux immaculées de la piscine Cazalet de Pessac. Le nageur, pessacais d’adoption, a ainsi eu l’honneur d’inaugurer le complexe flambant neuf devant des milliers de spectateurs.
Preuve de l’importance prise par le double médaillé de bronze aux Jeux Paralympiques de Paris dans le paysage sportif français et de Gironde. Pas de quoi pourtant faire perdre la boule au principal intéressé : « Ça a été une fierté d’être convié à cette inauguration. Mais depuis ma médaille olympique, j’ai repris ma vie d’avant, je le voulais d’ailleurs. Ma vie n’a pas changé. Juste après, j’ai été invité sur quelques plateaux télé, c’était sympa mais le soufflet, comme pour beaucoup, est vite retombé. »
Et pourtant, le bonhomme aurait de quoi bomber le torse. Car dans le handisport et dans le sport tout court, Laurent Chardard possède un sacré palmarès. En témoigne, le nageur de 30 ans affiche deux titres de champion du monde sur 50 m papillon S6, deux titres de champion d’Europe et des médailles à foison. Un CV agrémenté depuis l’été 2024 de deux médailles de bronze aux Jeux de Paris. Des breloques à la fois source de fierté et de soulagement : « Lors de mes premiers Jeux à Tokyo en 2021 j’avais terminé quatrième. Ce fut un peu compliqué de finir au pied du podium. Ça ne faisait pas très longtemps que j’étais dans le haut niveau et j’ai failli tout arrêter. Passer près d’une médaille olympique, c’est dur mais je m’y suis remis. »
Le caractère du sportif est passé par là. Car la résilience caractérise aussi Laurent dont la vie a basculé en août 2016. Lors d’une de ses nombreuses sorties en bodyboard sur son île de la Réunion, celui qui venait tout juste de s’installer en Gironde est victime d’une attaque de requin. Il y perd son bras droit et sa jambe droite. Mais à à peine 21 ans, Laurent Chardard décide de vite rebondir : « J’étais très sportif avant mon accident. Je faisais du rugby, du volley, du skate, du surf. J’ai voulu reprendre ma vie d’avant. J’ai opté pour la natation. J’en faisais un peu lorsque j’étais valide mais dès ma première compétition handisport en 2019, je suis devenu vice champion du monde et qualifié pour les JO de Tokyo. C’était parti. »
Une ascension qui mène le nageur jusqu’à Paris 2024 : « C’était incroyable cette ambiance. Je me dis que j’ai eu de la chance. Car rares sont les sportifs à évoluer devant leur public lors de Jeux. Je suis tombé au bon moment. Je garde un souvenir en particulier, c’est lors de l’entrée pour la finale. Le public scandait Laurent, c’est gravé en moi », répond avec encore des étoiles dans les yeux l’ingénieur chez Eiffage Energie Système où il s’occupe de l’installation de panneaux photovoltaïques.
Mais Paris 2024 équivaut aussi à une petite déception : « J’étais le champion du monde en titre. J’aurai pu aller chercher l’or » regrette un Laurent Chardard qui a aussi ramené une médaille de bronze sur 100 mètres nage libre S6 deux jours après l’obtention du même métal sur le 50 mètres papillon S6. « Kylian Portal qui partageait ma chambre au village olympique avait obtenu le bronze également peu avant. Du coup, nous avons mis nos médailles respectives en bandoulière sur notre lit » sourit-il.
Depuis, Laurent a analysé ce semi-échec : « Je me suis remis à fond dans l’entraînement après Tokyo et je suis sans doute arrivé émoussé à Paris. » Autre changement, le collectif : « J’avais l’habitude de m’entraîner seul et ça me peser. Je viens du rugby où l’esprit de groupe est fort. C’est pour ça que j’ai rejoint le club des Girondins de Bordeaux Natation. Je m’entraîne entouré à la piscine Judaïque. Ça fait la différence. Nous avons un bon groupe d’entraînement et ça motive.»
Car la suite est déjà programmée. Après sa place de quatrième à Tokyo, après la troisième de Paris, Laurent Chardard a Los Angeles 2028 dans le collimateur. Et l’expérience risque bien de faire la différence : « J’ai compris qu’il fallait y aller par palier au fil des saisons. C’est ce que je vais faire en montant en puissance sur les quatre saisons qui séparent les deux olympiades. »
Généralement, quand Laurent veut quelque chose, le multi champion du monde finit par l’obtenir.
Vincent Ferrandon
Crédit photo : sports33.fr
Légende : Laurent Chardard inaugure la pisscine Cazalet de Pessac.


